900 ans d’histoire. La fondation de l’ordre cistercien au XIIème siècle. Les cisterciens leur organisation. Les cisterciens en Rouergue.

 
Rares sont les entreprises humaines qui peuvent se prévaloir de neuf siècle d’existence. C’est pourtant le cas de l’Ordre cistercien, expérience initiée en 1098 dans la solitude des bois par Robert de Molesme.
Après des temps difficiles grâce à la forte personnalité et au charisme de ses abbés l’ordre éclot partout et six abbayes cisterciennes dont la présence va durablement marquer le territoire, vont voir le jour en Rouergue au cours du XIIème siècle.
 
A la fin du XIème siècle la Règle bénédictine, rédigée par Saint Benoit en 490, était appliquée partout selon le mode élaboré à Cluny qui privilégiait l’office divin au détriment du travail manuel. La richesse de Cluny repoussait tous ceux qui aspiraient aux  vraies valeurs de la chrétienté et qui recherchaient dans l’érémitisme le retour à une vie  pauvre et retirée du monde.
Robert fidèle à son idéal abandonnera Molesme qu’il avait créé en 1098 mais qui était devenue riche pour fonder « un nouveau monastère » à Cîteaux dans un dénuement total.
Etienne Harding, le troisième abbé en est le législateur, c’est sous son abbatiat que l’ordre cistercien s’organise et que le nouveau monastère prend le nom de Cîteaux. Il donne des règles à ce nouvel ordre monastique, établit la Chartre de Charité qui régit les relations entre les différentes abbayes les unes par rapport aux autres et institue l’obligation pour les abbés d’assister chaque année au Chapitre général qui se tiendra à Cîteaux.
Bernard de Clairvaux, qui rentre comme moine à Cîteaux en 1112 entrainant avec lui 30 compagnons donne une impulsion décisive à l’ordre des moines blancs. Elu abbé de Clairvaux jusqu’à sa mort en 1153 il sera un personnage incontournable du siècle, un conseiller des puissants qui va faire de son ordre le plus considéré  de la chrétienté.
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Les abbayes cisterciennes sont organisées autour du cloitre. Celui-ci est appuyé à l’abbatiale par son aile nord appelée de la Collation. L’aile est comporte sacristie, salle du chapitre, scriptorium et dortoir des moines au-dessus. Le côté sud comporte réfectoires et cuisines et le côté ouest est réservé aux convers (cellier, salle des convers et dortoir au-dessus) ; une ruelle donne directement au fonds de l’abbatiale, permettant d’y accéder sans passer par le cloître.
La principale caractéristique des abbayes cisterciennes primitives est leur austérité, la règle interdisant les décors, peintures et autres ornements trop riches ; l’église ne comporte pas de clocher, interdit par la règle. Ces caractéristiques disparaissent rapidement dès le XIIIe siècle, s’adaptant aux diverses modes.
Les cisterciens excluent tout profit issu du travail de serfs ou de paysans dépendants, ils insistent sur la valeur spirituelle du travail manuel, qui est une manière de glorifier Dieu. Le fonctionnement économique des monastères cisterciens repose sur la possession d’un patrimoine foncier dont l’exploitation est assurée en faire valoir direct. Les nombreuses donations permettent de créer des exploitations agricoles autonomes, les granges, vastes domaines ruraux, généralement peu éloignés des abbayes. Le travail sur ces domaines est habituellement effectué par des convers, religieux dispensés des nombreux offices et déliés de la clôture. Ces convers, de plus en plus rares seront ensuite remplacés par des donats, laïcs attachés à l’abbaye. Dès la fin du moyen-âge, les granges sont concédées à des fermiers qui les exploitent directement ou par des salariés. La Révolution Française va disperser les biens des abbayes, la plupart des granges devenant de grandes exploitations rurales.
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Six abbayes cisterciennes sont fondées durant le XIIème siècle en Rouergue[1] :
A l’ouest l’abbaye de Loc Dieu fondée par des moines venant de Dalon en 1124 et qui intégrera l’ordre cistercien en 1162 et l’abbaye de Beaulieu fondée en 1144 immédiatement cistercienne car étant une fille directe de Clairvaux[2]. Toutes les granges du domaine rural de Beaulieu n’ont pas pu être identifiées  (Argilario, Sonjournet…)
Au sud L’abbaye de Sylvanes fondée par Pons de Léras, noble un peu brigand en guise de repentir et qui rejoint l’ordre cistercien en 1136 avec comme abbaye mère Mazan (Vivarais). L’abbaye de Nonenque est un monastère de femme fondé en 1146 et affilié à Bellecombe (Velay) en premier puis à Sylvanes ensuite. Les granges de ces abbayes couvrent tout le sud Aveyron, atteignant Albigeois et Languedoc.  Sylvanès exploite de nombreuses mines d’argent.
Au nord c’est Guillaume de Calmont , évêque de Cahors qui fonde l’abbaye de Bonneval en 1147, c’est aussi une abbaye fille de Mazan. Elle constitue d’importantes granges, fortifiées au XVe siècle (Galinières, Séveyrac, Masse, La Vayssière..) qui représentent toutes une richesse exceptionnelle pour le département.
Au centre en 1167 le comte de Toulouse Raymond V et l’évêque de Rodez Hugues fonde l’abbaye de Bonnecombe affiliée à l’abbaye de Candeil (Tarn). Ses nombreuses granges (Is, Ruffepeyre, Vareilles, Lafon, Moncan, Bonnefon) sont fortifiées.
 
[1] En 1808 le Canton de Saint Antonin Noble Val qui faisait partie du Rouergue a été rattaché au département du Lot et Garonne
[2] Bernard de Clairvaux serait venu à Beaulieu au cours de son voyage en Languedoc en 1145…